Vous prenez des cours de salsa depuis quelques mois. Vous commencez à prendre suffisamment d’assurance pour aller en soirée. Et là, c’est le choc, c’est quoi cette musique ? De la salsa ? Mais ça ne ressemble pas vraiment à ce que votre prof passe en cours.
En vérité, derrière le mot « salsa », se cachent plusieurs univers musicaux, chacun avec leur particularité mais aussi leur ressemblance et connexions culturelles.
En route pour un voyage musical riche en découvertes.
C’est quoi la Salsa ? Plus qu’un rythme, un phénomène culturel !
Beaucoup se demandent si la Salsa est un genre musical défini ou un style de danse précis. En réalité, la Salsa est avant tout un mouvement musical et culturel, né dans les années 1970 à New York.
Pour beaucoup de musiciens et d’experts, la Salsa est une nouvelle synthèse du Son cubain, stylisée de manière contemporaine, et enrichie par un mélange de rythmes et de styles de diverses traditions caribéennes et latino-américaines.
Johnny Pacheco, co-fondateur de la légendaire Fania Records, explique qu’initialement, le terme « Salsa » était d’origine purement commerciale, créé pour uniformiser et vendre toute la musique que l’on appelait « tropicale » en Europe. Cependant, elle a rapidement dépassé cette simple étiquette pour devenir l’expression populaire d’une vaste communauté latino-américaine aux États-Unis.
Pourquoi existe-t-il plusieurs « Salsas » et quelles sont leurs différences ?
La richesse de la Salsa réside dans sa capacité à évoluer et à s’adapter, intégrant des influences de différentes cultures et périodes. Cette diversité a donné naissance à plusieurs courants, chacun avec ses caractéristiques, ses origines et ses artistes emblématiques.
1. Le Son Cubain : La Fondation de tout un continent musical
Impossible de parler de Salsa sans commencer par le Son Cubain. C’est la racine, le pilier fondamental de toute cette musique. Apparu entre la fin du XIXe et le début du XXe siècle à Cuba, le Son est une fusion fertile d’éléments européens et africains.
Né dans l’Oriente cubain, dérivé du Changüí, il s’est popularisé à La Havane au début du XXe siècle.
Le Son se distingue par son élégance, sa sobriété et sa « classe ». Au début, il était joué par un trio avec un Tres (guitare à 3 cordes), un bongo et une marimba, avant de s’étendre à des formations plus larges comme les sextetos.
Le Son est devenu un symbole national et a servi de base à une multitude de genres comme le Son Montuno ou le Boléro-Son.
Quelques artistes qui ont laissé une empreinte indélébile dans l’évolution du son.
Arsenio Rodríguez, considéré comme le « grand prophète » de la salsa, a transformé le son de manière significative en « inventant » le conjunto et en étant un virtuose du tres, sans même avoir une formation musicale formelle.
Un autre géant est Benny Moré, surnommé « el Bárbaro del Ritmo », reconnu pour sa liberté et son talent, ainsi que pour avoir enrichi le son montuno avec des influences de la guaracha et du boléro.
Enfin, le Trio Matamoros, s’est imposé dès 1925 comme le « porte-drapeau du Son Oriental » grâce à un style particulier et authentique, rayonnant de Santiago de Cuba à La Havane et New York par leurs enregistrements.
2. La Salsa (le mouvement originel à New York)
Si les racines sont cubaines, le phénomène « salsa » tel que nous le connaissons aujourd’hui est né dans le creuset multiculturel de New York dans les années 1970.
Elle est née de la nécessité culturelle d’une vaste communauté latino-américaine aux États-Unis, s’enracinant dans leurs traditions musicales spécifiques. Bien que ses fondations soient cubaines, elle a été enrichie par les apports de musiciens portoricains, dominicains, vénézuéliens.
Cette “Salsa Dura” est caractérisée par une orchestration puissante, des sections de cuivres percutantes (notamment les trombones au style distinctif) et une forte emphase sur le rythme et l’improvisation vocale (soneos). Elle est l’expression sonore du « barrio » et de ses réalités sociales et politiques, abordant des thèmes tels que la criminalité, la drogue, la prostitution, la douleur et le déracinement.
Des artistes comme Willie Colón, Eddie Palmieri, et Rubén Blades, sont des figures emblématiques de cette « salsa consciente ». Cette salsa mettait l’agressivité et la férocité avant la douceur.
3. La Salsa Romántica
Face au succès commercial grandissant de la Salsa, l’industrie a créé dans les années 1980 une tendance plus « douce », axée sur les ballades sentimentales, avec des arrangements plus doux.
Bien que parfois critiquée pour sa superficialité, souvent perçue comme un appauvrissement du genre, elle a permis de revitaliser la Salsa à l’échelle mondiale et d’attirer un nouveau public.
Malgré la tendance à la superficialité, des figures comme Gilberto Santa Rosa, ont su combiner des lettres romantiques avec une musique « agressive » et des arrangements bien réalisés.
4. La Salsa Colombienne
La Colombie a joué un rôle crucial dans l’évolution de la salsa, particulièrement lorsque le genre connaissait un déclin commercial dans d’autres régions. Dans les années 1990, alors que la « salsa romantica » dominait, les groupes colombiens ont maintenu le cap de la « salsa vieja » ou « salsa brava » avec leurs « touches fortes », devenant une alternative recherchée par les amateurs de salsa plus traditionnelle.
La Colombie, en particulier Cali, est un bastion majeur de la Salsa, avec une identité musicale et une popularité impressionnante. Le pays a développé sa propre scène Salsa avec une multitude de groupes et un public passionné, faisant de la Salsa une musique omniprésente au quotidien.
La Colombie est devenue, avec Puerto Rico, l’un des pays où la salsa est la plus présente et la mieux jouée.
Artistes et Groupes Marquants :
Joe Arroyo, créateur du « joesón », est une figure clé qui a réalisé une fusion harmonieuse des rythmes noirs de Cali avec le Son, apportant une revitalisation majeure au mouvement.
Le Grupo Niche, ainsi que l’orchestre Guayacán, sont devenus incontournables. Ils ont réussi à fusionner la musique folklorique colombienne avec les modèles habituels de la salsa, obtenant une acceptation notable même aux États-Unis et en Europe.
5. La Timba : L’innovation cubaine post-révolutionnaire
La Timba est la réponse cubaine à la Salsa, une évolution artistique majeure qui a marqué les années 1990 et continue de le faire. Pour de nombreux Cubains, la Timba n’est pas de la Salsa, mais une entité propre, un « sonido cubano » qui reflète la réalité et l’identité cubaine contemporaine.
La Timba est un genre très dynamique, une fusion du Son traditionnel avec des éléments de jazz, de rock, de funk, de rumba et de musique afro-cubaine rituelle. Elle se distingue par une organisation rythmique particulière, donnant une place prépondérante à la voix, notamment par l’usage de « coros » (refrains choraux) influencés par le rap. Ses paroles sont souvent tirées du quotidien cubain, utilisant l’humour et l’argot pour refléter la réalité sociale, les « problèmes de tous les jours ». C’est une musique qui « vit dans les rues, dans les files d’attente, dans la façon dont les gens parlent et dansent ».
La Timba a été un moyen pour les musiciens cubains, dans un contexte de crise économique de la “Période Spéciale”, de se renouveler et d’interagir avec les courants musicaux internationaux.
Artistes Clés: Des groupes comme NG La Banda (avec José Luis Cortés, « El Tosco ») ont été un véritable modèle pour la timba. Juan Formell et son groupe Los Van Van ont révolutionné la musique de danse cubaine en introduisant de nouvelles sonorités et structures instrumentales (violons à l’unisson avec la flûte, chants à trois voix, etc.) et en dialoguant avec la réalité cubaine. Adalberto Álvarez, surnommé « El Caballero del Son », a intelligemment réinjecté l’essence du Son cubain dans la sonorité de la salsa, le ramenant au premier plan.
Contrairement à la salsa qui est devenue un style internationalisé, la timba est fermement enracinée à Cuba en termes de références musicales, de langue et de danse. Ses musiciens sont souvent issus d’une formation classique de conservatoire, alliant virtuosité technique et culture de rue.
Votre voyage dans l’univers de la Salsa commence ici !
Comme vous pouvez le constater, la Salsa est un monde fascinant, riche en histoire, en culture et en diversité.
Apprendre la Salsa, ce n’est pas seulement maîtriser des pas ; c’est aussi s’immerger dans une culture, comprendre ses rythmes, ses expressions et ses histoires.
Chez votre Sa Mèm Cuba, nous sommes passionnés par cette richesse et nous vous invitons à venir l’explorer avec nous.
À très bientôt sur la piste !